Tribune publiée dans Causeur le 18 août 2017. Par Gilles Lorenzen
La reconstruction de la droite française se fera avec les amoureux de la liberté.
Force est de constater que la droite a fait fausse route. C’est un fait, dont il faut tirer les leçons. Les conservatismes se sont essoufflés. Nous avons échoué à mobiliser largement et l’abstention en est l’illustration la plus significative. Seulement 9% des jeunes ont voté pour la droite à la présidentielle. Nous devons retrouver le chemin de la liberté, dans le respect des autres, vertu cardinale de notre engagement. Ce sera la condition pour reconstruire le projet politique de la droite et du centre autour de la jeunesse et des forces vives qui souhaitent entreprendre pour leur pays.
Nous sommes convaincus que la grande erreur commise au cours de ces dernières années, c’est d’avoir cru en l’État interventionniste pour tous, en tout, et partout. Une réduction de son rôle s’impose. Pour retrouver la confiance, nous souhaitons que la jeunesse retrouve les chemins de son indépendance. Les progrès du numérique et « l’ubérisation » de notre économie offrent de nouvelles opportunités et d’infinies possibilités pour s’accomplir. La question n’est pas de savoir si cela est bon ou mauvais. Nous sommes une génération pour laquelle le travail indépendant va être une réalité. Faisons de cette réalité une chance ! Nous assistons certes à la fin d’un monde mais à nous d’inventer et de définir les règles du prochain.
Accompagner la révolution numérique
Le projet de la droite doit être construit sur les réalités qui traversent notre pays et le quotidien de ses habitants. Les étudiants et les jeunes actifs le savent : les trajectoires professionnelles ne sont plus aussi linéaires qu’autrefois. L’essor du numérique bouleverse le travail et change en profondeur nos modes de vie. Nous sommes pourtant peu préparés au renouveau du marché de l’emploi. La formation est la clé de l’adaptation à ce nouveau monde.
Nous connaissons une révolution du travail, rapide et innovante, plus importante encore que la révolution industrielle, capable de renverser la spirale infernale du chômage des jeunes si nous nous adaptons au lieu de combattre des changements irréversibles. Il s’agit d’encourager les jeunes à entreprendre partout, sur tous les territoires, et de leur assurer les conditions du succès. La lutte contre les « zones blanches » doit être prioritaire : l’innovation et les savoir-faire ne sont pas le monopole des villes. Nos villages et nos campagnes renferment des talents, des volontés et des besoins que le numérique peut révéler à la condition d’un réseau internet de qualité. Les nouvelles formes de travail, pour qu’elles soient une chance, doivent être encouragées et facilitées. Chaque jeune de 16 ans, familier du numérique, devrait bénéficier d’un passeport numérique d’activité, comportant entre autres un numéro SIRET, pour pouvoir entreprendre librement et mettre à profit ses compétences. Ce serait encourager l’innovation dans chaque foyer. Ce serait surtout faire confiance aux forces créatrices de notre jeunesse.
« L’Etat est plus souvent un problème qu’une solution »
Avant de demander la confiance des Français il est nécessaire que leurs représentants aient une confiance réciproque et croient en nous. En renforçant la mainmise de l’État, en éloignant les citoyens des décisions politiques, nous avons éloigné des urnes celles et ceux qui souhaitent la réussite de la France. Pire, une des grandes erreurs de nos aînés ces dernières années est d’avoir laissé croître le « politiquement correct », d’avoir laissé la liberté d’expression se réduire petit à petit, faisant ainsi le jeu des extrêmes. C’est là le grand enjeu pour la droite française que d’embrasser un nouveau souffle, le souffle libéral, qui saura libérer les énergies, les idées, les esprits.
Il n’est rien de plus respectable que l’ambition, chez des hommes et des femmes de notre pays, à vouloir améliorer comme ils l’entendent leur niveau de vie et la prospérité des leurs. Il n’est rien de plus respectable chez les jeunes que de vouloir défendre leurs convictions. Se donner les moyens de la réussite, et en être justement récompensé, est une aspiration que nous avons en commun. Cet horizon est autrement plus stimulant qu’aucun autre. Nous nous proposons d’en être l’écho au sein de notre famille politique avec DroiteLib et aux côtés de Virginie Calmels.
L’État est bien plus souvent un problème qu’une solution, si ce n’est en matière régalienne où il doit être renforcé. Gauche comme droite portent le lourd bilan de l’étatisme français qui n’a su que gangrener notre pays d’un technocratisme et d’une bureaucratie paralysante, sans toutefois être capable d’améliorer notre sécurité. Un sursaut est possible ! Notre différence avec le mouvement En Marche est claire : nous ne croyons pas en un modèle démocratique fait de toutes les compromissions. Nous croyons au progrès mais nous ne croyons pas au multiculturalisme à la canadienne. Nous portons un vent d’optimisme, mais nous ne sommes pas naïfs face aux dangers de l’islamisme radical. Nous défendons la liberté d’entreprise, mais pas seulement au profit des grands groupes. Nous valorisons les compétences, mais pas au profit de la technocratie. Nous nous battons pour la réussite de chacun, mais ne pensons pas que certains sont tout et d’autres rien.
« A vouloir trop intervenir, l’Etat sacrifie l’émancipation et la réussite de tous »
En matière de finance publique, l’exécutif n’est pas à la hauteur du dérapage de nos finances publiques. La dette va atteindre 100% du PIB. Le gouvernement est en marche… au pas lent. In fine, il a pris la décision de laisser le robinet ouvert. Il devient pourtant urgent de changer nos pratiques économiques. Financer l’État par la dette est un compte d’apothicaire bien connu des professionnels du court terme. C’est en réalité faire peser sur chaque nouvelle naissance plus de 32.000 euros de dette. Est-ce l’avenir que nous souhaitons pour celles et ceux qui viendront après nous ? Nos enfants méritent-ils une existence à crédit ? Demander à l’individu de ne pas vivre au-dessus de ses moyens est indécent pour un État qui se sert du contribuable pour racheter ses fautes financières. La dépense publique doit être très largement réduite et avec elle le périmètre de l’État. L’essentiel de son effort doit être redonné aux missions régaliennes. Il ne s’agit plus d’idéologie. Il ne s’agit plus de responsabilité. Il s’agit d’une nécessaire urgence pour éviter la débâcle. Se contenter d’un déficit budgétaire inférieur à 3% n’est pas suffisant. Pour notre budget public, nous nous devons de nettoyer les écuries d’Augias.
Aujourd’hui, entre les discours identitaires et le chant des marcheurs, beaucoup doutent d’une renaissance de la droite. La ligne politique à adopter doit être celle de la liberté pour se différencier de tous les dirigismes. Celle d’une droite construite autour d’un axe clair : un État fort au niveau régalien et un recul de l’État en matière économique. Abandonnons cette tradition étatiste, qu’elle soit socialiste, nationaliste, ou en marche, et qui étouffe notre quotidien, spécialement celui des plus démunis. Restreindre l’État, c’est renforcer son rôle de facilitateur et proposer ce qui n’a jamais été fait dans un pays comme le nôtre, dominé par l’esprit jacobin. Aux adversaires du libéralisme, empruntons à Friedrich Hayek la formule : « nous disons qu’en dernier ressort, la société de libre concurrence recourt à l’huissier, mais l’économie dirigée, au bourreau. L’État, à vouloir trop protéger, condamne chacun à l’assistanat et à la punition. L’État, à vouloir trop intervenir, sacrifie l’émancipation et la réussite de tous. Un État toujours plus présent nous apparaît incompatible avec la liberté de chacun et chacune d’entre nous ». Et pour ceux qui pensent que libéralisme rime avec individualisme et égoïsme, citons une nouvelle fois Hayek : « Il y a toutes les différences du monde entre traiter les gens de manière égale et tenter de les rendre égaux. La première est une condition pour une société libre alors que la seconde n’est qu’une nouvelle forme de servitude ».
Liberté, liberté, liberté
La droite a l’opportunité de surmonter ses doutes en se dotant d’un projet résolument différent, audacieux et libéral. Les Français attendent aujourd’hui une voix forte et une volonté de faire ce qui doit être fait. Ils craignent qu’un avenir libre et prospère reste lettre morte pour eux alors que l’État s’engraisse et s’immisce dans leur quotidien. Ne les décevons plus. La droite de demain est celle d’hommes et de femmes qui veulent prendre leur destin en main. Elle est celle d’une nouvelle génération, plus moderne et à l’écoute du peuple. Elle est celle de la confiance accordée à la jeunesse et à ses talents. Elle est celle d’une société ouverte, innovante, humaine et indépendante. Celle d’une société qui croit en l’avenir, mais ne veut pas pour autant abattre son passé, sa culture, ses racines. La reconstruction de la droite française se fera avec les amoureux de la liberté.