Paru le 14 mars 2018, J’assume, le premier livre de Virginie Calmels, revient sur les quatre années précédentes et retrace l’engagement politique de la femme d’entreprise qui a rejoint l’équipe municipale d’Alain Juppé à Bordeaux. Campagne municipale à Bordeaux, tête de liste pour les élections régionales en Nouvelle-Aquitaine, primaire de la droite, campagne présidentielle, élection au côté de Laurent Wauquiez pour la présidence du parti, … Virginie Calmels vous raconte l’histoire de son engagement.
Retrouvez un extrait du livre de Virginie Calmels sur son engagement pour la reconstruction de la droite
« On en revient aux deux lignes très distinctes chez les juppéistes, ceux de « l’identité heureuse » à laquelle Édouard Philippe appartient sans nul doute et ceux de Pour un État fort à laquelle j’appartiens. Alain Juppé étant probablement les deux en même temps, c’est d’ailleurs pour cela qu’il en apparaît complexe.
Quoi qu’il en soit, qu’Édouard Philippe n’applique pas aujourd’hui le projet d’Alain Juppé mais celui d’Emmanuel Macron est un fait qui ne souffre aucune contestation, ne lui en déplaise. Je pourrais citer la longue liste des mesures préconisées par Juppé et non mises en œuvre par le gouvernement Philippe : quotas d’immigration, restauration des peines planchers, durcissement des règles de regroupement familial, aménagement de l’aide médicale d’État, diminution du délai de traitement des demandes d’asile, fermeture des mosquées salafistes, obligation des prêches en français, suppression des 35 heures, fin des régimes spéciaux de retraite, âge de la retraite à soixante‐cinq ans, suppression totale de l’ISF, réduction de la dépense publique de 100 milliards, baisse des charges de 40 milliards, suppression de 250 000 fonctionnaires, etc.
Alors que tout ce que je viens d’énoncer est effectivement dans le tronc commun du projet de la droite auquel Laurent Wauquiez est lui aussi attaché. CQFD.
La vérité c’est qu’il n’y a que dans le domaine de l’éducation que l’on peut considérer que l’action gouvernementale est globalement en phase non seulement avec le projet Juppé, mais également avec le projet Fillon. Et pour cause. Jean‐Michel Blanquer aurait été le ministre de l’Éducation d’Alain Juppé, pour lequel il avait beaucoup travaillé sur le projet qui aboutira à l’ouvrage Mes chemins pour l’École, et il aurait été celui de François Fillon, les deux me l’ont confié. Il est aujourd’hui celui d’Emmanuel Macron, preuve que la qualité et la compétence peuvent aussi parfois triompher dans le monde politique et que la nécessité de détricoter le projet porté par Najat Vallaud‐Belkacem faisait un large consensus. Il effectue un travail remarquable ce qui en fait une star du gouvernement, témoignant ainsi de ce que la compétence éclipse la politique politicienne, à l’instar de Muriel Pénicaud ou d’Agnès Buzyn qui, elles aussi, sont issues de la société civile.
Et même si cela peut déranger certains, je continuerai à expliquer qu’on est plus cohérent à rester dans sa famille politique qu’à en partir, même si cette famille est dirigée par Laurent Wauquiez. À condition bien sûr d’en partager la vision politique et notamment sa volonté d’un régalien fort. À condition également que la ligne politique du parti ne tombe pas dans des excès de langage, ou pire, de fond, qui conduiraient à l’éclatement de la droite. Il est capital que notre famille politique reste un parti de gouvernement, un mouvement de proposition plus que d’opposition systématique ou de contestation incarnant le libéralisme conservateur républicain. Et j’y veillerai. Je reste donc totalement convaincue que c’est sur ces questions – nécessité d’un régalien fort et nécessité de ne pas tomber dans la démagogie – que vont s’opérer des césures idéologiques significatives. C’est tout le défi de la droite et de Laurent Wauquiez que d’adopter une ligne ferme et résolue, sans tomber dans la caricature. Les Français sont intelligents, ils ne supporteraient pas que la droite devienne simpliste.
Entre ceux d’un côté qui pensent qu’il n’y a pas de problème d’intégration majeur dans notre pays et que côtoyer de plus en plus de femmes voilées n’est finalement en aucun cas un souci, et ceux qui pensent que la République a déjà trop accepté en la matière, le clivage se dévoile. Je suis catholique, croyante et mes enfants sont dans une école catholique, mais je suis aussi profondément attachée à la laïcité, gage du bien vivre ensemble, et à la lutte contre toute forme de communautarisme.
La lutte contre l’islam politique fait surgir d’autres césures idéologiques : entre ceux qui semblent minimiser la portée – ou qui sont accusés de les minimiser – des faits graves comme en juillet 2014 des « Mort aux juifs ! » scandés dans les rues de Paris, ou le 26 juillet 2016 un prêtre assassiné dans son église, et ceux qui revendiquent avec force, voire parfois véhémence, qu’il va falloir sortir la tête du sable et agir durement en la matière.
La question de l’identité, à laquelle je préfèrerais la notion de « défense de la Nation », reste un marqueur indiscutable entre la gauche sociale démocrate et la droite. Et c’est notamment sur cette question que je me sens profondément de droite. Mais Emmanuel Macron n’a pas fini de nous surprendre et peut‐être osera‐t‐il sur cette question majeure « droitiser » sa position ? À titre personnel, j’aspire profondément à une plus grande responsabilité d’Emmanuel Macron sur ces sujets dans l’intérêt de notre pays car l’hystérisation du débat est telle qu’il est devenu si difficile à un acteur de droite de porter ces questions. J’en viens même à envier Manuel Valls qui va loin dans son expression mais qui évite les caricatures ou les diabolisations auxquelles la droite doit, elle, systématiquement faire face. Mais concernant le gouvernement actuel, je suis malheureusement pessimiste en la matière. Lorsqu’Emmanuel Macron parle du risque de « laïcité radicalisée », je suis heureuse de voir que même Manuel Valls critique de façon virulente ces propos en affirmant tout simplement que « le danger de la société française, ce n’est pas la laïcité radicalisée, mais l’islam radical ».